En tant qu’hypersensible, j’ai toujours voulu comprendre ce qu’il se passait dans ma tête et comment fonctionnaient mes émotions. Ça me semble vraiment important parce que comprendre comment ça marche dans ma tête me permet après de pouvoir l’adapter au mieux. Si on comprend comment un problème se passe, on peut par la suite trouver une solution adéquate. On peut gérer son hypersensibilité.
Pour ceux qui ne me connaissent pas encore, je m’appelle Paul et j’ai un haut potentiel intellectuel (HPI) Aujourd’hui, on va essayer de comprendre comment fonctionne un cerveau hypersensible.
Dans cet article, je cherche donc à comprendre la différence entre un cerveau hypersensible et un cerveau « normal ». Alors je me permets de préciser tout de suite que je risque de dire cerveau normal assez régulièrement. Il n’y a vraiment aucun mal là-dedans. C’est juste pour faire la différence entre un cerveau hypersensible et un cerveau qui ne l’est pas, donc un cerveau qui est sous-entendu dans la moyenne, dans la norme, et donc normal.
La dopamine influence le cerveau des hypersensibles
On commence tout d’abord avec l’impact de la dopamine sur le cerveau. Alors un petit rappel : la dopamine, c’est un produit chimique qui circule dans notre cerveau et qui s’occupe de la récompense. On l’appelle souvent l’hormone de la récompense ou le circuit de la récompense. Vous l’avez certainement entendu comme ça. En gros quand on réussit certaines actions notre cerveau est félicité par de la dopamine. Ça lui donne une sensation de bien-être, donc on retombe bien sur notre idée de récompense. C’est ce qu’il se passe par exemple quand on a une promotion, quand on reçoit un joli chèque, ou qu’on fait partie d’un groupe social, qu’on entre dans un nouveau groupe social.
Maintenant si on en revient à notre cerveau hypersensible. Qu’est-ce qu’il se passe ?
Et bien en fait il y a eu quelques scientifiques en 2011 qui ont cherché à le découvrir. Je vais vous passez un peu tous les détails compliqués. (Pour information, vous retrouverez en bas de l’article les sources utilisées). Ce qu’ils ont découvert, c’est que chez les personnes hypersensibles il n’y avait pas une seule différence au niveau de la dopamine mais plutôt dix variations génétiques (toutes liées à la dopamine). À ce jour, ils n’arrivent pas encore vraiment totalement à expliquer comment ces variations diffèrent et leur effet est un peu mystérieux.
En tout cas, ces 10 variations génétiques impliquent un système de la récompense qui est différent. Ce que ça veut dire, c’est que les hypersensibles ne sont pas autant récompensés – ou du moins pas de la même façon – que les personnes normales. Par exemple certains peuvent aimer des bars bruyants, d’autres non. Typiquement mes amis adorent ça, moi ça m’énerve (ou alors je suis juste un peu relou !). Pour faire simple, les hypersensibles reçoivent des shots de dopamine sur des situations différentes des personnes normales.
L’hypersensibilité rend hyper-empathique
Donc ça m’amène à peu près bien à ma partie suivante qui et l’activation sociale du cerveau – et vous verrez pourquoi c’est important avec la dopamine. Donc là on part sur une autre recherche scientifique où une équipe de chercheurs a fait passer des IRM à des personnes qui étaient hypersensibles. Ils les ont installés dans l’IRM et ils leur ont montré des images de personnes (soit leurs partenaires, soit des inconnus). Ces personnes montraient une émotion en photo, que ce soit la joie de la tristesse n’importe quoi d’autre. Ainsi, ils ont pu observer ce qu’il se passait dans le cerveau des hypersensibles quand ils voyaient une personne exprimer une émotion. C’est ce que montrent les IRM ci-dessous.
On voit par exemple qu’il y a des zones précises qui s’activent. Sur les photos A et E on voit qu’en fait ce sont deux zones qui sont responsables de la de la conscience. Sur les D et F c’est carrément le cortex préfrontal (donc vraiment notre centre de contrôle) qui est activé. On voit également qu’il y a de l’activité au niveau du cortex somatique (IRM B). Concrètement quand on touche une table avec le doigt par exemple, notre doigt va envoyer un signal au cerveau et tous les signaux sensoriels de notre corps, que soit le toucher comme l’exemple ou l’odorat, le goût, etc., remontent au niveau du cortex somatique. Donc on remarque que juste en voyant l’image d’une émotion les personnes hypersensibles ont vraiment des réactions physiques. Enfin on aperçoit également (IRM C) que l’aire tegmentale ventrale (j’adore ce nom !) s’active. Et cette aire tegmentale ventrale est responsable de plein de choses dans le corps mais entre autres de la production de dopamine. Donc on voit bien que les hypersensibles sont récompensés (leur circuit de la récompense est activé) lorsqu’ils font des rencontres sociales.
Ce qu’on peut conclure de cette expérience c’est que, chez les hypersensibles, les émotions illuminent complètement le cerveau. Mais aussi on peut dire que les hypersensibles sont hyper-empathiques. Ils ne font pas que réaliser et comprendre les émotions des autres (comme ce qu’on pourrait entendre avec l’empathie normale) mais là carrément ils les intègrent au sein même de leur corps. Si la personne est triste ils vont pas juste ressentir de la tristesse ils vont réellement être triste. Ce sont des éponges émotionnelles.
D’autres études se sont un peu penchées sur ce sujet-là (l’hyper-empathie), et pour le moment je n’ai pas trouvé vraiment de résultats hyper probants. Alors si vous en avez n’hésitez pas à me les partager j’adorerais ça. Il semblerait que cette empathie se joue au niveau des neurones miroirs et de la noradrénaline.
La carence en sérotonine déstabilise les émotions
Et enfin on termine sur la troisième partie du cerveau hypersensible qui est la sérotonine. Je sais pas si vous connaissez vraiment la sérotonine mais pour faire simple c’est un neurotransmetteur qui stabilise notre humeur. Plus on en a plus on a l’humeur stable. Si on n’en a pas trop on a vraiment des hauts et des bas et c’est une catastrophe. C’est un schéma vraiment pour simplifier, ça ne se passe pas exactement comme ça, mais c’est pour donner l’idée.
La concentration de la sérotonine dans notre cerveau est gérée par un petit transporteur qui vient régulièrement l’éliminer de notre cerveau pour qu’elle se renouvelle, qu’elle soit toujours fraiche. Finalement, c’est vraiment le rythme de ce transporteur qui gère notre concentration en sérotonine. Jusque-là, l’idée est plutôt simple. Mais Dame Nature en a décidé autrement.
Au fil du temps, ce transporteur a évolué et chez certaines personnes maintenant on retrouve un transporteur qui est beaucoup plus efficace, beaucoup plus puissant. Il a le doux nom de 5-HTTLPR. Vu qu’il est beaucoup plus efficace, il a tendance à éliminer beaucoup plus de sérotonine du cerveau. Du moins il en élimine trop pour que le cerveau ait le temps de la remplacer. Du coup ces personnes-là ont une carence en sérotonine. À cause cette carence, nos humeurs ont plus de hauts et de bas, il y a moins de régulation émotionnelle.
Et maintenant petit jeu : devinez qui parmi les cerveaux normaux et les cerveaux hypersensibles ont cette variation ? C’est les cerveaux hypersensibles sans surprise. Donc ils ont vraiment été biologiquement programmés pour ressentir les choses plus intensément et avoir du mal à les gérer. Ce n’est pas juste dans la tête (enfin si c’est dans la tête) mais il y a des preuves là-dessous. Ce n’est pas juste une sensation.
Cerveau hypersensible : conclusion
Donc je récapitule ce que l’on sait sur le cerveau hypersensible :
(1) la dopamine, qui sert à alimenter le circuit de la récompense, n’est pas distribuée est ressentie de la même façon. Du coup les individus qui une grande sensibilité ne sont pas récompensés de la même manière et ils ne cherchent pas les mêmes choses.
(2) Les personnes hypersensibles font également preuve d’hyper-empathie. Ils captent, analysent et ressentent les émotions des autres. Ça alimente une sensation de bien-être et produit de la dopamine.
(3) Et enfin la sérotonine est mieux évacuée (enfin plus activement évacuée) du cerveau, du coup ils ont tendance à avoir moins de régulation émotionnelle et à être moins stabilisés émotionnellement (je sais pas si ça se dit) et à ressentir les choses de manière plus forte, plus profondément.
Discussion : l’hypersensibilité est-elle un avantage évolutif ?
Alors je fais également une petite dernière partie parce qu’en faisant mes recherches pour réaliser cette vidéo j’ai remarqué un point dont je voulais vous faire part. Je ne sais pas trop quoi en penser mais certains voient vraiment l’hypersensibilité comme un avantage évolutif de l’Homo Sapiens. Il semblerait, selon les dires de ces personnes-là, que les hypersensibles arrivent à prendre des meilleures décisions car ils captent plus de stimuli extérieurs. Lorsqu’il faut prendre une décision, ils captent mieux toutes les stimulations de leur environnement. Ils arrivent mieux à prendre une décision plus performante, et in fine ont un avantage évolutif. Un peu comme de l’intelligence émotionnelle améliorée.
Voilà je donnais les infos là, je serais curieux de voir ce que vous en pensez. Moi de mon côté je n’ai vraiment pas l’impression d’être un X-Men. Je ne me sens pas privilégié par rapport à mes ressentis, même au contraire des fois je le vis un peu de manière plus handicapante (mais ça peut se gérer).
FAQ sur le Cerveau Hypersensible
Pourquoi est-ce qu’un hypersensible ressent les émotions des autres aussi intensément ?
Le cerveau des hypersensibles réagit fortement aux émotions des autres en activant plusieurs zones cérébrales liées à la conscience et à l’empathie. Cela signifie que les hypersensibles ne se contentent pas de comprendre les émotions, ils les ressentent physiquement. Ce phénomène est renforcé par une activité accrue des neurones miroirs et une production de dopamine en réponse aux interactions sociales, rendant les émotions des autres aussi réelles que leurs propres émotions.
Comment la dopamine affecte-t-elle le bien-être d’un hypersensible ?
La dopamine, connue comme l’hormone de la récompense, fonctionne différemment chez les hypersensibles en raison de dix variations génétiques spécifiques. Ces variations influencent le système de récompense du cerveau, faisant en sorte que les hypersensibles ne se sentent pas récompensés de la même manière que les autres. Ils peuvent trouver des activités sociales ou des environnements spécifiques plus ou moins agréables, ce qui explique pourquoi certaines situations plaisent à d’autres mais peuvent être accablantes pour eux.
Pourquoi les humeurs d’un hypersensible varient-elles autant ?
Les hypersensibles ont souvent un transporteur de sérotonine (5-HTTLPR) plus efficace, éliminant la sérotonine du cerveau plus rapidement que la normale. Cette réduction de sérotonine entraîne des fluctuations émotionnelles plus importantes et une moindre stabilité de l’humeur. Cette variation biologique rend les hypersensibles plus vulnérables aux hauts et aux bas émotionnels, leur faisant ressentir les choses de manière plus intense et difficile à réguler.
Est-il normal que les environnements bruyants dérangent autant un hypersensible ?
Oui, les hypersensibles sont souvent plus affectés par les environnements bruyants ou chaotiques. Leur système de récompense et leur réponse sensorielle diffèrent, ce qui signifie qu’ils peuvent trouver certains stimuli accablants ou stressants. Cette réaction est liée à la façon dont leur cerveau traite la dopamine et les sensations, rendant les environnements bruyants ou surchargés sensoriellement désagréables pour eux.
Comment un hypersensible peut mieux gérer son hypersensibilité ?
Comprendre les mécanismes biologiques derrière l’hypersensibilité peut aider à mieux la gérer. En connaissant les particularités de la dopamine et de la sérotonine, vous pouvez identifier les situations qui vous procurent du bien-être et celles qui vous stressent. Pratiquer des techniques de gestion du stress, telles que la méditation ou la respiration profonde, et chercher un environnement adapté à votre sensibilité peut également vous aider à naviguer dans le monde avec plus de confort et de stabilité.
Sources :
- Acevedo B., Aron A., Aron E., Brown L., Collins N., Sangster MD., (National Institute of Health), The highly sensitive brain: an fMRI study of sensory processing sensitivity and response to others’ emotions, 2014.
- Anderson K., Ehlers M., Freeman N., Levine B., Müller D., Palombo D., Robertson A., Todd R., (The Journal of Neuroscience), Neurogenetic Variations in Norepinephrine Availability Enhance Perceptual Vividness, 2015.
- Chen C., Moyzis R., Stern H., He Q., Li H., Zhu B., Dong Q., Contributions of Dopamine-Related Genes and Environmental Factors to Highly Sensitive Personality: A Multi-Step Neuronal System-Level Approach, 2011.
- Dingman M., (Neuroscientifically Challenged), Know your brain: cingulate cortex, 2015.
- Fogassi L., Gallese V., Rizzolati G., (Pour La Science), Les neurones miroirs, 1999.
- McIntosh J., (Medical News Today), What is serotonin, and what does it do?, 2020.
- Phelps J., (Psychiatric Times), The Serotonin Transporter Gene: What’s New?, 2015.
- Sander van Doorn G., Weissing F., Wolf M., (National Academy of Sciences of the United States of America), Evolutionary emergence of responsive and unresponsive personalities, 2008.
- Spinalcord, Insular Cortex, 2020.
- Wkipédia, Système dopaminergique.